PRÉVENTION DE LA PÉNIBILITÉ : Un dispositif loin de se limiter au C2P

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La prévention de la pénibilité a fait l’objet d’une sorte de valse législative dont témoigne la création, en 2010, du Compte de prévention de la pénibilité (C3P) puis sa suppression, en 2017, au profit d’un Compte professionnel de prévention (C2P). Beaucoup d’employeurs finissent donc par s’interroger sur l’étendue des obligations qui leur incombent en la matière. Voici une synthèse de ce qu’il leur revient désormais de mettre en œuvre.

La prévention de la pénibilité étant intimement liée aux préoccupations résultant de l’allongement de la durée de la vie professionnelle, la loi du 9 novembre 2010 « portant réforme des retraites » a modifié le Code du travail pour y introduire, à l’article L. 4121-1, une obligation de prévention de la pénibilité au travail, découlant de l’obligation générale de sécurité qui incombe à l’employeur. Le terme de « pénibilité » faisait ainsi son entrée dans le Code du travail.

Moins de trois ans plus tard, l’ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 revenait sur cette modification en supprimant toute mention de « facteurs de pénibilité ». Mais la suppression du mot n’a pas supprimé la chose. En effet, l’article L. 4121-1, précise que l’employeur doit mener « des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L. 4161-1 ». Or, les « risques professionnels » recensés dans cet article sont bien les mêmes que ceux que la loi de 2010 qualifiait de « facteurs de pénibilité ».

De la même façon, le Compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) créé par la loi de 2010 a été remplacé, en 2017, par le Compte professionnel de prévention (C2P). Le principe de fonctionnement du nouveau compte est inchangé : si un salarié est exposé à des risques professionnels « facteurs de pénibilité » au-delà de certains seuils, l’employeur doit faire une déclaration et le C2P permet au salarié exposé d’acquérir des points ouvrant droit à formation, temps partiel ou départ anticipé à la retraite.
Les 6 facteurs de risques du C2P.

En revanche, le nombre de risques professionnels pris en compte par ce dispositif est plus restreint. Tandis que le C3P prenait en compte 10 facteurs, le C2P n’en compte plus que 6. Les « manutentions manuelles de charges », les « postures pénibles définies comme positions forcées des articulations », les « vibrations mécaniques » et les « agents chimiques dangereux, y compris les poussières et les fumées » sont retranchés de la liste. Ne sont donc plus concernés dans le nouveau dispositif que :
– le « travail en milieu hyperbare »,
– le « travail de nuit »,
– le « travail en équipes successives alternantes »,
– le « travail répétitif caractérisé par la réalisation de travaux impliquant l’exécution de mouvements répétés, sollicitant tout ou partie du membre supérieur, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte »,
– les « températures extrêmes »,
– et le « bruit ».

Ce retranchement de quatre facteurs risques a pu créer une confusion en laissant croire qu’ils étaient purement et simplement supprimés et ne devaient, par exemple plus être pris en compte dans l’évaluation des risques. Or, il n’en est rien : l’ensemble des dix risques professionnels listés à l’article L4161-1 du Code du travail doivent être évalués et présents dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). Socle de toute démarche de prévention, le document unique est aussi la première étape des démarches de prévention de la pénibilité.

D’ailleurs, le C2P ne se substitue pas aux dispositifs déjà existants et est complété par d’autres obligations relatives à la pénibilité :
– Les entreprises (ou groupes) de 50 salariés et plus, dont 25 % sont exposés à la pénibilité doivent être couvertes par un plan d’action de branche ou d’entreprise selon les cas (voir tableau récapitulatif ci-dessous).
– Le C2P ne remplace pas le système de « retraite anticipée pour incapacité permanente » (anciennement « retraite anticipée pour pénibilité » de la loi du 9 novembre 2010).
– Le C2P est complémentaire du dispositif de retraite anticipée pour carrières longues qui permet aux assurés ayant commencé à travailler jeunes d’anticiper leur départ à la retraite.

Comme l’ancien C3P, le C2P ne constitue qu’une modalité particulière de mise en œuvre de l’obligation générale de sécurité qui incombe à l’employeur. La création du C2P entraîne, pour les employeurs concernés, des actions spécifiques, notamment en termes de compensation pour les salariés exposés, mais il ne se substitue en rien à l’obligation d’évaluer et de prévenir l’ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs, y compris ceux dont l’exposition aux facteurs de risque ne dépasse pas les seuils légaux.


Christophe Blanc

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