ÉVALUATION DES RISQUES : la solution du préventeur extérieur

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Pour la rédaction du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUER) et sa mise à jour chaque année, certaines entreprises font le choix de se faire accompagner par un intervenant extérieur. Leur visite est l’occasion de faire un état des lieux des dispositifs et autres actions de prévention des risques. Nous avons suivi une de ces visites.

Située dans une zone d’activité au sud de Caen, dans le Calvados, l’entreprise Créa’plexi est spécialisée, depuis sa création en octobre 2004, dans le façonnage de produits plastiques, du projet unique à la grande série : assemblage, collage, découpe, gravure, pliage, polissage et usinage, l’entreprise s’est dotée d’un atelier de quatre postes de travail nécessitant une quinzaine de machines à la pointe de son activité.

Entre la mobilité dans l’atelier, la manipulation des outils, le fonctionnement des machines et le déplacement des matériaux et autres produits finis, les risques sont nombreux et son gérant, Stéphane Onfroy, est parfaitement conscient des risques, mais il admet que cela n’était pas forcément le cas lorsqu’il a créé l’entreprise. Il a accueilli ses premiers salariés et puis sont survenus les premiers incidents, une coupure par exemple mais sans conséquence et puis une autre pas si anodine qui a nécessité un premier arrêt de travail. “À ce moment-là, précise le gérant, j’ai commencé à me dire que c’était un signe et qu’il fallait faire preuve de plus d’attention sur la problématique des risques et prendre des mesures concrètes pour y remédier.” Il a aussi fallu faire face à l’impact sur l’activité de l’entreprise et aux problèmes de réorganisation suite à l’arrêt de travail. Dans le même temps, la machine administrative s’ est mise en marche. “Personnellement, reconnaît Stéphane Onfroy, étant associé avec mon épouse j’ai eu la chance qu’elle prenne en charge cette dernière partie, mais en tant que gérant j’ai pris conscience de mon obligation de sécurité.”

Lorsqu’il s’est trouvé face à l’obligation de rédiger son DUER, Stéphane Onfroy n’a pas tergiversé. Il s’est renseigné sur Internet pour savoir de quoi il s’agissait et comment on le rédigeait. “Toutefois, précise-t-il, quand j’ai vu l’ampleur de la tâche, le temps et les compétences que cela nécessitait, j’ai eu peur de ne pas être en capacité de le maintenir à jour. Nous avons donc pris le parti de nous faire aider par une entreprise spécialisée dans la prévention des risques professionnels.” Chaque année, celle-ci envoie un intervenant en prévention des risques professionnels (IPRP) qui épaule l’entrepreneur pour la mise à jour de son DUER. Cette année, c’est Véronique Paradis qui assure cette mission en se rendant sur le site de l’entreprise.

Visite préalable à la réalisation du DUER

Après avoir fait un point administratif dans le bureau de Stéphane Onfroy, quelques sujets d’ordre général sont abordés comme la volonté de Stéphane Onfroy de mieux réguler la température de l’atelier où il peut faire très chaud pendant l’été. Il précise que, la veille, la température est montée à 35°. Il est conscient de la nécessité d’agir. En raison des coûts, il n’a pas donné suite à l’idée de l’installation d’une climatisation classique. Déjà dans son rôle de conseil, Véronique Paradis attire d’ailleurs l’attention du gérant sur la nécessité d’entretien d’un système de climatisation et sur les risques de maux de gorge qu’un tel système peut générer. Stéphane Onfroy envisage une autre solution, un dispositif de rafraîchissement d’air évaporatif (RAE).

La visite du site peut commencer, mais avant de faire le tour de l’atelier, le premier arrêt concerne la salle de pause, une pièce d’une vingtaine de m2, dotée d’un réfrigérateur et aménagée en cuisine. Avec le contexte de crise sanitaire, Véronique Paradis questionne Stéphane Onfroy sur la limitation du nombre de personnes. Sans avoir pris de mesures à ce sujet, le gérant précise que dans l’entreprise chacun se responsabilise pour éviter de créer des effets de groupe dans la salle. Ce n’est pas trop compliqué d’autant que seuls deux salariés déjeunent sur place pendant la pause de midi. De plus, une table à l’extérieur leur permet de manger dehors lorsque le temps le permet.

L’intervenante remarque sur un mur de la pièce une armoire à pharmacie. Elle en vérifie le contenu. D’emblée, Stéphane Onfroy signale qu’il a une réserve pour éviter les ruptures de stock d’un produit ou de pansements.
Un grand poster attire l’attention de Véronique Paradis : l’affichage obligatoire en termes de risques. L’intervenante prévient que l’affichage doit être changé. Il nécessite une mise à jour concernant des changements de mentions légales et surtout l’ajout d’informations liées au harcèlement.

Direction l’atelier, un espace de 1 200 m2 agrandi déjà deux fois et où travaillent sept des dix salariés de l’entreprise, répartis sur quatre postes de travail : collage, pliage, usinage, montage et finition.
Étant ventilé pour l’extraction des odeurs de colle, le poste de travail dédié au collage est isolé des autres postes par des cloisons transparentes. Dans un second espace clos, se trouve aussi une imprimante numérique qui permet de réaliser des décorations ou des enseignes sur tout support dont le plastique.

Ainsi, tous les postes sont passés au crible. Le gérant y prend le temps d’expliquer dans le détail l’activité de chaque salarié. Il en profite pour évoquer certains risques pour lesquels il a déjà pris des initiatives afin de mieux les prévenir. Au poste de pliage, les pièces travaillées sont réalisées sur mesure à la demande des clients. Elles peuvent donc être de tailles et de formes très diverses. Réalisée à chaud, d’où des risques de brûlure, l’opération peut nécessiter l’usage de différentes machines : automatiques, semi-automatiques ou manuelles. Elles sont au nombre de sept sur ce poste. Stéphane Onfroy s’ est aussi aperçu que le collaborateur dédié à ce poste passait beaucoup de temps en station debout à piétiner. Même si le salarié en poste ne se plaint pas, le gérant envisage d’installer sur le sol des tapis anti-fatigue adaptés, pour prévenir les troubles musculo­squelettiques (TMS).
Stéphane Onfroy reconnaît que le bruit est un problème dans l’atelier même si tous les collaborateurs sont dotés de protections auditives sous forme de bouchons anti-bruit. C’est le cas, en particulier, à proximité du poste d’usinage. Le préposé aux machines peut devoir rester jusqu’à quatre heures d’affilée devant celles-ci. Les risques liés à ce poste sont aussi inhérents aux mauvaises manipulations possibles et aux risques de coupure, comme avec l’usage de la scie circulaire. Il n’y a toutefois jamais eu d’accident, précise le gérant.

Il a déjà procédé à des améliorations sur ce poste. Auparavant, deux ou trois personnes étaient nécessaires pour saisir sur la palette les plaques brutes de plexiglas, de grand format, et les disposer sur la machine où sont effectuées les découpes. Désormais, une seule suffit. Elle ne manipule pas directement la plaque mais recourt à un système ergonomique d’aide à la manipulation manuelle : une potence avec préhenseur, permettant de limiter les efforts physiques du collaborateur en poste et limitant ainsi les risques de coups ou de blessures musculaires.
Face au poste d’usinage, dans une cabine, se trouve l’opérateur qui effectue la programmation des découpes des plaques. Véronique Paradis profite de l’environnement moins bruyant pour s’informer sur l’organisation du travail sur le poste. Les deux postes n’étant pas totalement interchangeables, le compte est fait sur le temps passé par l’opérateur devant l’écran : environ 4 heures par jour. La visite de l’atelier reprend par le poste dédié au montage, à la finition et à l’emballage.

Mise à jour des informations inscrites sur le DUER

À l’issue de la visite du site de l’entreprise, Véronique Paradis et Stéphane Onfroy vont faire le point sur les informations publiées dans le DUER, dans l’optique des modifications nécessaires pour sa mise à jour. Cette étape est plus ou moins longue, selon les modifications de l’organisation ou de l’outil de travail de l’entreprise au cours de l’année. Dans le cas d’une visite pour une première rédaction du DUER, celle-ci serait de fait plus longue puisqu’il s’agirait, pour l’intervenante, de partir d’une page blanche. Toutefois, comme le signale Véronique Paradis, en ayant plusieurs clients sur le même type d’activités, des risques similaires apparaissent forcément dans l’évaluation des risques quand d’autres sont pratiquement inhérents à une activité professionnelle comme le risque de chute.
Commence l’inventaire des informations inscrites dans le DUER. Il s’agit, dans le détail de faire le point sur les machines disponibles dans l’atelier pour ajouter celles qui n’y seraient pas mentionnées et supprimer celles qui ne seraient plus utilisées. C’est le cas également des outils électroportatifs : ponceuse, meuleuse, disqueuse, perceuse pneumatique, scie sauteuse, des produits chimiques, essentiellement les colles et les diluants utilisés dans le cadre de l’activité, des équipements de protection individuels (EPI) et des véhicules de société : trois véhicules particuliers et un utilitaire léger.

L’intervenante profite également de sa visite pour jeter un œil au registre de sécurité. Elle prend un maximum d’information dans le cadre de l’actualisation du DUER. Après rédaction, chaque nouvelle version doit être signée par le chef d’entreprise. Celle-ci devra aussi rester à la disposition des salariés. Ils doivent en effet eux aussi être conscients des risques, mentionnés dans le détail dans le document. Une synthèse par unité de travail est toutefois aussi disponible. Un niveau de cotation accompagne les risques afin que l’employeur puisse traiter, en priorité, les dangers les plus importants.

Le facteur sécurité n’est pas le seul à apparaître, les risques liés à la santé aussi. Véronique Paradis précise qu’à terme, en cas de maladie professionnelle déclarée, le DUER pourra être consulté pour savoir ce que l’entreprise avait fait en amont de la déclaration de la maladie.

Au final, au-delà de la tâche administrative que représente le DUER, la visite de l’intervenant en prévention des risques professionnels permet aussi d’éclairer l’entrepreneur sur d’éventuelles failles du dispositif de sécurité dans l’entreprise, aussi bien dans l’atelier que dans les bureaux ou sur le parking.

“On évoquait, pendant la visite, le panneau obligatoire à mettre à jour dans la cuisine. Personnellement, je n’y avais pas pensé”, admet Stéphane Onfroy. “De la même manière, la réglementation et les normes liées à la sécurité et la santé au travail évoluent constamment, il est donc préférable qu’un spécialiste de la question suive cette actualité parce que je n’ai pas le temps de m’informer personnellement. Alors, certes, il ne faut pas nier que cela représente un coût de faire appel à un intervenant extérieur, reprend le gérant, mais si on veut bien comparer ce coût à ce qu’il serait en cas d’accident, les comptes sont vite faits. Entre le temps gagné et la rigueur du travail de l’intervenant, je vois beaucoup d’avantages à cette formule. Je n’oublie pas non plus que certaines améliorations du process, comme avec le lève-plaque, permettent d’améliorer aussi bien la sécurité que la productivité. Résultat ? Personnellement, je ne suis pas près de changer de mode de fonctionnement pour rédiger mon DUER.”

Stéphane Chabrier

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