“Il y a eu un vrai consensus […] pour reconnaître que les patrons avaient fait le nécessaire pour assurer la sécurité des salariés.” C’est le premier enseignement que le sociologue des organisations François Dupuy retire de l’étude qu’il a récemment co-réalisée pour mesurer l’impact de la crise sanitaire sur le fonctionnement des entreprises (1). De la sorte, il confirme que l’attention portée à la santé et à la sécurité de ses collaborateurs est un facteur clé de résilience parce qu’elle crée de la confiance et de la cohésion.
Ses découvertes ne s’arrêtent pas là. En analysant les différents types de réponses élaborées par les entreprises, François Dupuy a aussi remarqué que celles qui ont réagi par “une stratégie d’accentuation et de renforcement de l’appareil réglementaire” ont vu apparaître, en leur sein, “des phénomènes de ‘désobéissance organisationnelle’, tant il devenait impossible de faire face aux difficultés quotidiennes en appliquant de nouvelles normes”. Conformément à l’adage, trop de règles tue la règle ! Si bien que le succès reposait plutôt sur l’intervention efficace de “l’encadrement de proximité, qui avait deux missions : assurer la continuité de l’activité et veiller sur l’état de santé physique ou mentale des personnes fragiles”.
Ces observations rejoignent l’idée que nous nous faisons du métier de préventeur. En effet, nous considérons que son rôle ne se limite nullement à vérifier, de façon mécanique, la conformité à des normes et à des règlements. Au-delà de cette nécessaire attention, il faut aussi veiller à agir comme de véritables partenaires, capables de comprendre l’activité afin d’apporter une assistance opérationnelle, utile au “travail réel”. C’est ce qu’oublient souvent les “institutionnels” de la prévention.
Ce nouveau numéro de notre revue, dont le dossier est consacré à la prévention des risques en agriculture, illustre cet état d’esprit. En effet, au-delà des normes pléthoriques s’appliquant au monde agricole, il vise à rendre compte de la véritable nature des défis que ses acteurs relèvent au quotidien. Comme vous le verrez, les efforts accomplis méritent d’être salués et soutenus, notamment en matière de prévention des risques.
François Sidos
Président du Groupe Pôle Prévention
(1) Entretien accordé à Travail & Sécurité n° 825, avril 2021.