Éric, chef d’équipe sécurité : “Le métier n’est pas simple car le contact avec le public se fait essentiellement sur la base de situations de tension.”

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Depuis 37 ans dans les métiers de la sécurité, dont trente environ en tant que chef d’équipe, Eric officie pour une enseigne de la grande distribution dans un centre commercial du Val d’Oise. Il porte un regard sans concession sur une activité pourtant en plein essor.

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En effet, avec les Jeux Olympiques en particulier, il y a une forte demande d’agents de sécurité. Mais la faiblesse des salaires attire, hélas, essentiellement des profils de personnes sous-qualifiées.
Par exemple, sur mon site de travail, un centre commercial, l’enseigne de grande distribution pour laquelle je travaille fait de plus en plus souvent appel à des sociétés de sous-traitance pour les agents de sécurité. Or, je constate que les agents y sont malheureusement d’un niveau très faible de connaissance du métier et d’implication voire de capacité à faire face aux évènements, dans le secours à la personne ou lors des interventions.


Pas obligatoirement. Ainsi, les agents de sécurité dédiés, en magasin, à la prévention vols et situés en arrière-caisse dans les hypermarchés, n’ont pas besoin du diplôme Service de sécurité incendie et d’assistance à personnes (SSIAP). Seuls les encadrants comme le chef d’équipe doivent en être titulaires. Dans l’établissement de type ERP où je travaille, il faut obligatoirement en poste : un SSIAP 2 et deux SSIAP 1, pendant la durée d’ouverture du magasin.

La formation au SSIAP 1 intègre une habilitation électrique dite H0B0 et des connaissances sur la sécurité incendie. Le niveau 2 permet d’obtenir le statut de chef d’équipe et il intègre une formation incendie avec manipulation des systèmes de sécurité incendie, une formation Sauveteur secouriste du travail (SST) et une autre à la gestion d’une situation de crise en tant que chef du poste central de sécurité. De plus, le recyclage de ces formations est régulier, ce qui garantit une bonne maîtrise des compétences. En revanche, les agents de sécurité doivent être uniquement détenteurs de la carte professionnelle.

Pour disposer de cette carte professionnelle, il faut être majeur, avoir un casier judiciaire vierge et répondre aux conditions d’aptitude professionnelle. De plus, un code de déontologie a été créé il y a une dizaine d’années. Les personnes exerçant des activités privées de sécurité ou celles ayant des activités de formation à ces activités de sécurité doivent s’y soumettre. Ce code est relativement contraignant et engage les professionnels de la sécurité à faire preuve d’un comportement irréprochable, y compris dans le cadre de leur vie privée. Une bagarre dans la rue, un gros excès de vitesse… le moindre écart de conduite dans ta vie privée peut impliquer la perte de la carte, s’il te conduit devant un tribunal. Cette carte a donc permis d’assainir la profession mais elle ne garantit en rien la compétence des agents sur le terrain. Selon moi, il y a une dégradation de la formation des agents de sécurité. Les entreprises du secteur n’ont pas toujours les moyens de prendre en charge le coût des formations d’autant que le profil des personnels qualifiés n’est pas le plus recherché. Et le manque de main-d’œuvre n’arrange évidemment rien. Comme dans tous les métiers en tension, les employeurs ont tendance à être moins regardants sur la qualité des candidats.

Notre principale activité concerne la surveillance et les risques de vol. Auquel cas, nous devons parfois faire face à des situations tendues qui peuvent aller jusqu’à l’agression physique. Ce n’est pas simple à gérer parce que face à un phénomène de bande on peut être amené à intervenir en sous-effectif. Il existe des techniques d’intervention dans toutes les situations, mais les agents de sécurité ne les maîtrisent pas forcément. Ainsi, travailler avec des agents sous-qualifiés, que tu ne connais pas parce qu’ils proviennent d’entreprises sous-traitantes, en qui tu n’as pas forcément confiance dans les situations chaudes, c’est un stress supplémentaire.

Il faut savoir faire preuve de psychologie en toute circonstance. Ce n’est pas simple car le contact avec le public se fait principalement sur la base de situations de tension. De plus, comme chacun peut le constater, la violence se banalise dramatiquement. Elle est de moins en moins punie par la loi. Aujourd’hui, pour une ITT de moins de huit jours, un dépôt de plainte n’aboutit même plus, notamment dans les secteurs géographiques dits sensibles où les incivilités sont les plus fréquentes. Ce sentiment d’impunité a évidemment des répercussions directes sur l’exercice de notre métier. De la même manière pour les vols, en-dessous d’une certaine somme, on sait qu’il n’y aura pas de poursuite. En outre, si une interpellation ou une intervention sur un point chaud ne se passe pas de la meilleure des manières, tu dois faire face aux reproches de ton entreprise alors qu’elle n’a pas formé ou qu’elle ne s’est pas assurée du niveau de compétence des agents qu’elle emploie. Tout ceci finit donc par peser psychologiquement.

Propos recueillis
par Stéphane Chabrier

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