Il n’est pas toujours simple dans les entreprises de lutter contre les dangers inhérents à l’activité professionnelle. Entre les risques liés à l’activité de l’entreprise et les mauvais comportements, voire les addictions aux substances psychoactives, les Établissements Botrel s’appuient sur des formations sécurité et une surveillance sur les chantiers, afin d’inculquer à ses collaborateurs une culture de sécurité.
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Présente dans le secteur du bâtiment depuis près de 60 ans, la SAS Établissements Botrel est implantée à Ploumagoar, dans les Côtes d’Armor. Ses domaines de compétence s’étendent de la plomberie sanitaire à l’électricité, en passant par le chauffage et la ventilation. Dans ces domaines, l’entreprise s’est spécialisée au fil du temps, intervenant désormais principalement sur des chantiers de réhabilitation de logements sociaux et de bâtiments tertiaires (80 % de l’activité de l’entreprise).
Volonté d’excellence
« La réhabilitation, signale Yohann Botrel (ci-dessus), président de l’entreprise depuis 2021, cela signifie que les logements sont existants et nous avons la charge de placer des équipements ou de faire des réhabilitations thermiques : plomberie, chauffage, ventilation et électricité. Soit nous devons créer ces installations, soit nous devons les remplacer. Pour l’électricité, cela correspond à de la mise aux normes électriques, le remplacement de tableaux, de prises, etc. »
Mais l’entreprise reste également très impliquée sur des chantiers de construction en neuf pour le compte de maîtres d’ouvrage publics ou privés. Ainsi, la taille des chantiers est variable, de deux ou trois pavillons à des sites de 300 logements, les chantiers sont donc aussi d’une durée très variable. Sur ce type de chantiers, il faut compter sur un rendement d’environ un logement par jour et les équipes de travail sont calibrées en fonction de la charge de travail.
Formations ciblées à la sécurité
Ainsi, sur les 65 salariés que compte l’entreprise, la plupart sont soit plombiers-
chauffagistes (deux tiers) soit électriciens (un tiers). L’ entreprise est aussi dotée d’un bureau d’études.
Pas de surprise. Les principaux risques rencontrés dans l’entreprise sont ceux susceptibles de survenir sur les chantiers : chutes et blessures dues à l’usage de l’outillage (coupures, coups, manutention…). Ce sont essentiellement des accidents bénins. « Bien sûr, précise Yohann Botrel, les spécialistes participent aux formations spécifiques à leur domaine de prédilection, comme celles liées au gaz pour les plombiers-chauffagistes qui manipulent couramment des postes de soudage, donc des chalumeaux. C’est le fournisseur de bouteilles de gaz : oxygène, acétylène… qui réalisent ces formations. Quant aux électriciens, ils ont des rappels réguliers qui leur sont imposés par la réglementation concernant les normes électriques haute et basse tension. »
Une trentaine de collaborateurs sont aussi formés Amiante. L’entreprise ne fait plus de chantiers de désamiantage mais ses équipes doivent encore travailler parfois dans des bâtiments qui peuvent en comporter. ils connaissent donc les protocoles pour travailler dans ces conditions.
La SAS Botrel ne se contente pas des formations réglementaires. Elle est ouverte à d’autres formations pour prévenir les divers risques, s’il y a une demande en interne. Par exemple, une formation « Gestes et postures » a été mise en place. Celle-ci satisfait le président de l’entreprise qui confirme qu’elle a plutôt bien aidé les salariés sur le terrain. Entre dix et quinze d’entre eux profitent de cette formation tous les deux ou trois ans. En outre, ils ont aussi bénéficié d’une formation sur les risques routiers.
« On a deux sortes de réactions lors de ces formations, analyse Yohann Botrel. Des personnes très concernées et au contraire des personnes qui n’ont pas l’impression que ces formations puissent leur apporter quelque chose et qui d’évidence ne modifieront pas leur comportement au volant. Nous avons perçu des réserves aussi sur le thème des addictions. Il y a quelques années, pourtant, nous avons eu quelques cas de conducteurs contrôlés avec une alcoolémie positive. Désormais nous sommes confrontés parfois à des cas liés à la prise de stupéfiants. C’est un phénomène inquiétant et pour en avoir discuté avec d’autres chefs d’entreprise du secteur, nous savons que le mal est répandu. » Yohann Botrel est bien conscient de sa responsabilité sur le sujet : «L’été dernier, nous avons eu des doutes concernant la prise de stupéfiants chez un salarié. Après plusieurs rappels à l’ordre, nous avons organisé un contrôle auquel il n’a pas voulu se soumettre. En définitive, nous avons dû nous en séparer. »
Faire face aux addictions
L’éventualité du contrôle de dépistage de produits stupéfiants est inscrite dans le règlement intérieur. Ainsi, tous les salariés de l’entreprise sont prévenus de la possibilité d’être sanctionnés dans le cadre d’un contrôle de dépistage positif. « Nous faisons des rappels réguliers sur la question et malgré cela, nous avons également eu des cas de salariés qui ont perdu leur permis pour usage de stupéfiants », déclare le patron.
Pour ces mises en garde, la SAS Botrel fait aussi appel à des interlocuteurs extérieurs : l’assureur, la médecine du travail ou un IPRP. « Ils ont la légitimité pour expliquer les parts de responsabilité dans de telles situations. Ainsi, l’entreprise est responsable mais ça peut aussi coûter très cher à un conducteur contrôlé positif à l’alcool ou aux stupéfiants en cas d’accident corporel, par exemple. Il faut qu’ils en soient aussi conscients », argue le chef d’entreprise.
La réaction de l’entreprise dépend du contexte. « Si c’est en dehors des heures de travail, on fait du cas par cas. Pour un chef de chantier, on peut essayer de l’associer avec un apprenti qui aura son permis de conduire, sinon il va perdre de son influence… mais si c’est pendant les heures de travail, on peut lui signifier son licenciement ».
Mais dans ce cas aussi, rien est simple, même quand l’entreprise est dans son bon droit. Yohann Botrel en veut pour preuve le cas vécu, par le passé, d’un salarié licencié après avoir été contrôlé et arrêté sous l’emprise de stupéfiants et sans permis de conduire au volant d’un véhicule de l’entreprise. Le salarié en question a attaqué l’entreprise aux prud’hommes. Il a perdu mais avec les différents appels, l’affaire a mis cinq ans à se régler.
Prévention sur les chantiers
Le périmètre d’intervention de la SAS Botrel s’étend sur toute la Bretagne et principalement dans les grandes métropoles de la région : Rennes, Brest, Lorient, Vannes… jusqu’à Nantes. Elle ne réalise que 20 % de son activité dans son département d’origine.
Pour limiter les risques sur la route, lorsque des équipes interviennent plusieurs jours sur un chantier loin des bases de l’entreprise, les collaborateurs sont logés à l’hôtel. En général ce sont les chefs de chantier qui conduisent les véhicules. « Ces derniers sont attribués, afin que leurs conducteurs en prennent plus facilement soin. Ils sont choisis pour leur expérience et leur maturité et des éventuels manquements aux règles de sécurité sont particulièrement mal vus ». Yohann Botrel le reconnaît, il n’est pas toujours facile de faire respecter les mesures de sécurité sur les chantiers comme le port des équipements de prévention individuels (EPI) : casque, gants, etc. « Quand l’information d’un manquement éventuel me
parvient, c’est qu’elle n’a pas pu se régler simplement et que l’affaire est jugée suffisamment inquiétante et dangereuse ». Pourtant, la sécurité sur les chantiers est encadrée et surveillée. « Nous, nous avons des coordinateurs sécurité sur les chantiers. De plus, les dispositions applicables et les mesures de prévention des risques propres aux chantiers du BTP sont disponibles dans le PPSPS, le plan particulier de sécurité et de protection de la santé. Ils englobent tous les risques potentiels identifiés. C’est obligatoire et il doit être à la disposition du Maître d’ouvrage et du coordinateur SPS ». Plus généralement, le PPSPS n’exempte pas les entreprises de réaliser leur document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). En raison de son importance et de la nécessité de le mettre à jour, Yohann Botrel a choisi de déléguer sa réalisation à l’extérieur pour avoir une expertise permettant de mettre en évidence d’éventuels soucis ou risques qui n’auraient pas été vus au sein de l’entreprise.
Par ailleurs, les Établissements Botrel comptent trois chargés d’affaires qui font jusqu’à 60 000 km par an. Ils passent régulièrement sur les chantiers. Le patron y passe également mais de façon inopinée et le cas échéant rappelle à l’ordre les fautifs. « Nous sommes organisés de façon à contenir le problème, signale Yohann Botrel. On essaye de mettre du matériel récent, donc performant à disposition de nos collaborateurs et c’est aussi plus facile de les convaincre d’utiliser les EPI quand ils sont impliqués dans le choix. Toutefois, je sais que d’autres entreprises ont davantage de difficultés que nous à faire régner des comportements responsables vis-à-vis du port des EPI et plus globalement des règles de sécurité, notamment celles qui font intervenir des sous-traitants qui n’ont pas véritablement de structure, tels les plaquistes, les peintres des artisans, et qui travaillent seuls, bien souvent ».
Stéphane Chabrier