Un risque insidieux parfois négligé
Les produits chimiques sont présents partout et la vie professionnelle n’y échappe évidemment pas. Quelque 88,18 % des entreprises suivies utilisent des produits chimiques étiquetés avec des pictogrammes de danger. Le plus souvent, il s’agit toutefois de produits de nettoyage ménagers, présents en très faibles quantités et que les utilisateurs peinent à considérer comme dangereux.
Dans 67,38 % des entreprises, les travailleurs sont exposés à d’autres agents chimiques dangereux (ACD) tels que des fumées (soudure, gaz d’échappement…), des poussières (ciment, farine, sciure…), des gaz et d’autres produits volatils. Et dans 29,45 % des entreprises, le chef d’établissement identifie la présence d’ACD faisant l’objet d’une Valeur Limite d’Exposition Professionnelle contraignante : benzène, poussières de bois, chlorure de vinyle, plomb et ses composés… Enfin, 3,72 % des entreprises suivies effectuent encore des travaux exposant à l’amiante, notamment à l’occasion d’interventions en chauffagerie, plomberie ou rénovation de toiture.
En termes de prévention, on peut se féliciter que, dans 90,04 % des cas, le risque chimique est identifié et traité. Ainsi, les moyens de traçabilité des expositions aux ACD (listes des travailleurs exposés, fiches d’exposition, anciens documents uniques, SIR…) ne sont absents que dans 5,06 % des cas. En revanche, l’étiquetage des récipients de transvasement fait défaut dans 8,97 % des entreprises concernées et le stockage des produits chimiques n’est pas convenablement aménagé (captage, rétention, ventilation…) dans 8,61 % des cas.
La principale marge de progrès porte sur la tenue des Fiches de Données de Sécurité (FDS) des produits utilisés. Dans 36,73 % des entreprises concernées, ces fiches ne sont pas présentes, rédigées en français, consultées, respectées, ou transmises au Service de Prévention et Santé au Travail. Le respect de ce formalisme est une obligation légale qui ne devrait pas être négligée. De surcroît quand elles sont présentes, les utilisateurs ne sont pas informés et les fiches ne sont pas présentes au plus près du lieu d’utilisation du produit.
De même, dans 22,19 % des cas, si les travailleurs exposés à ces produits par contact cutané, inhalation ou par ingestion sont bien identifiés, ils ne sont, en revanche, pas spécifiquement formés à leur utilisation (décryptage des pictogrammes, connaissance des incompatibilités, recours aux moyens de protection). Ces lacunes s’expliquent toutefois par le fait que la grande majorité des entreprises utilise peu d’agents chimiques dangereux et que leur usage n’est alors pas représentatif de leur coeur de métier. Comme le note Émilie Noel, responsable recherche et développement prévention chez Pôle Prévention, « plus les produits sont dangereux et utilisés fréquemment, plus ils font l’objet d’une évaluation et d’une prévention rigoureuse ».