Le travail de réfection d’une chaussée routière nécessite des tâches – fraisage, rabotage ou balayage – qui s’effectuent avec des engins tout aussi spécifiques. Fraisage Services loue ces véhicules avec les opérateurs, formés patiemment en interne à la conduite très particulière
de ces engins.
La location de fraiseuses routières, avec opérateur, est la principale activité de l’entreprise Fraisage Services (Groupe Bremat). Elle compte une quarantaine de salariés répartis sur deux sites en Île-de-France et un autre en Normandie. Son parc est composé de 25 engins, utilisés dans le cadre de chantiers de réfection de la chaussée en particulier. Il compte aussi 3 balayeuses routières que l’entreprise loue dans les mêmes conditions. La durée des chantiers est variable, entre un jour, dans 80 % des cas, et plusieurs semaines.
Des engins spécifiques à conduire
Les engins étant déplacés d’un chantier à l’autre sur des “porte-chars”, le risque routier est donc le risque principal dans l’entreprise. Les principaux dangers ne résultent pas de la vitesse, ou plus globalement des infractions au Code de la route, mais de l’environnement urbanisé dans lequel se déplacent les véhicules lourds d’une longueur de 18 mètres, soit les risques d’accrochage qu’ils engendrent. Ce risque est même plus important que celui de la manœuvre ou de l’utilisation des engins sur les chantiers.
Pour accéder à ces chantiers, chaque opérateur d’engin est aussi le conducteur du véhicule lourd qui le transporte. Ils sont donc tous titulaires du permis EC, qui autorise la conduite d’un poids lourd de plus de 3,5 tonnes (permis C), attelé d’une remorque dont le PTAC dépasse 750 kg (1). Les nouveaux opérateurs passent généralement leur permis après deux années d’ancienneté dans l’entreprise.
Mais la conduite et la manipulation des engins n’augurent pas que des dangers liés à leurs déplacements. Les opérateurs sont également sujets à d’éventuels troubles musculo-squelettiques. “Certaines activités nécessitent en effet des contraintes physiques, reconnaît Arnaud Gouva, directeur général de Fraisage Services. C’est le cas du changement de certaines pièces lourdes telles que les dents de la machine qui permettent d’ôter les enrobés de chaussée. Le système empirique consiste à taper sur la dent pour la remplacer, à l’aide d’une massette et d’un burin. Dos, coude, épaule…, le haut du corps est soumis à rude épreuve.” Mais, aujourd’hui, des engins pneumatiques ou hydrauliques existent et la modernisation du parc permet de soulager les opérateurs des tâches les plus pénibles. Chez Fraisage Services, l’âge moyen du parc est inférieur à 5 ans et les engins y sont gardés entre 8 et 10 ans. Ce renouvellement régulier permet donc de profiter des progrès techniques, visant à améliorer la sécurité du conducteur notamment, et les divers risques encourus par ce dernier sont réduits.
Chantiers sécurisés
Sur les chantiers, ce sont davantage les personnels amenés à intervenir à proximité des engins, ou à les croiser, qui sont potentiellement en danger. C’est pourquoi les engins sont désormais équipés de caméras. En activité sur les chantiers de nuit, ils sont aussi dotés de faisceaux laser projetant un encadrement lumineux rouge au sol, tout autour de l’engin. Il indique à tout le personnel à pied qu’il ne faut pas franchir ce périmètre, pour des raisons évidentes de sécurité.
Les chantiers s’effectuent dans des conditions de sécurité précisées par les donneurs d’ordre qui n’ont pas pour habitude de transiger sur la sécurité. Balisages, arrêtés de circulation, traçage des réseaux… rien n’est laissé au hasard ! “Nos clients sont essentiellement les grands groupes de travaux publics français qui interviennent aussi à l’international, annonce Arnaud Gouva. Ces donneurs d’ordre sont extrêmement rigoureux sur les questions de sécurité. Quand nos opérateurs arrivent sur place, les chantiers sont déjà sécurisés et ils travaillent dès lors sous la responsabilité du client. En cinq ans, dans l’entreprise, j’ai été confronté une seule fois à un salarié qui m’a alerté sur la dangerosité qui régnait sur un chantier.”
Sur place, les opérateurs ont aussi l’obligation de porter les équipements de protection individuels (EPI) inhérents à leur activité : vestes fluorescentes avec bandes rétro-réfléchissantes, chaussures, gants et autres lunettes de sécurité.
Formation par des tuteurs
Deux panoplies complètes d’EPI sont distribuées aux nouveaux opérateurs dès leur premier jour dans l’entreprise : la première pour les chantiers, la seconde pour l’activité en atelier. “Je reçois personnellement chaque nouveau salarié, lors de son embauche, prévient le directeur général. Pendant une demi-journée, on fait ensemble le tour des règles de base de sécurité indispensables pour mettre les pieds sur un chantier.” Tout le monde comprend aujourd’hui, les plus jeunes en particulier, que la sécurité est un enjeu essentiel. “Lorsqu’ils intègrent l’entreprise, précise toutefois Arnaud Gouva, les opérateurs sont rarement issus d’une filière liée aux travaux publics. Il y a par exemple parmi mes salariés un boulanger et un cuisinier de formation. Ils vivent cette activité comme une passion. D’ailleurs, pour ceux dont ce n’est pas le cas, ils quittent l’entreprise assez rapidement au cours des premiers mois.”
Les nouveaux salariés sont tous formés par compagnonnage, pendant 1 à 6 mois, selon leur profil et leurs capacités. Dans un premier temps, ils se contentent d’observer l’opérateur en activité et notamment tous les gestes de sécurité à maîtriser sur un chantier. Peu à peu, ils sont associés au fonctionnement de l’engin mais toujours sous le contrôle de l’opérateur confirmé. Pour ces engins à la conduite très spécifique, le CACES (2) étant peu adapté, ce suivi par les opérateurs les plus expérimentés est indispensable. En attendant qu’ils soient autonomes, ils interviennent uniquement en binôme.
Y compris après l’obtention de leur permis, soit parfois plus de deux ans après leur embauche et le début de leur formation, les opérateurs restent encore sous la surveillance ponctuelle de leur formateur qui les rejoindra sur leur chantier pour s’assurer que tout se passe dans les règles.
Stéphane Chabrier
(1) Pour passer le permis CE, il faut avoir au moins 21 ans et avoir le permis C. Un contrôle médical est également obligatoire. (2) Certificat d’aptitude à la conduite d’engins en sécurité.