Longtemps, la prise en compte des questions de santé et de sécurité au travail a reposé sur la prescription de normes et de règles formelles à respecter par les entreprises dans une logique de simple “protection”. Comme le rappelle Hervé Lanouzière, ancien directeur de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact), cette approche “se traduisait par la parution de textes réglementaires, de nature technique, énonçant des obligations de moyen précises. Elle reflétait une approche dans laquelle à chaque risque, considéré isolément, était associée une solution technique (1)”.
Or, même si cette façon de faire a permis une baisse significative des accidents du travail, elle a aussi montré ses limites. En effet, dans ce cadre, les pathologies résultant de la conjonction de plusieurs causes peinaient à être identifiées et prévenues. C’est pourquoi, à compter des années 70, la législation va progressivement promouvoir une forme plus proactive de la santé au travail qui trouvera une traduction éclatante avec le Document unique d’évaluation des risques (DUER). Avec celui-ci, il ne s’agit plus seulement de se conformer à des textes mais d’identifier les risques présents dans l’entreprise de façon à les prévenir avant qu’ils ne se réalisent.
D’une logique de conformité sous contrainte, on est ainsi passé à une logique de créativité et de progrès continu qui se prolonge désormais dans le concept de qualité de vie au travail (QVT). En effet, après la “protection” et la “prévention”, la QVT fait rentrer l’entreprise dans l’ère de la “promotion” de la santé au travail. Cette inflexion n’est pas neutre. Elle signifie d’abord que le travail ne doit pas seulement être envisagé sous le seul angle des risques qu’il comporte, mais aussi comme un possible vecteur de bien-être pour ceux qui l’accomplissent. Elle souligne aussi que l’amélioration des conditions de travail contribue à la performance de l’entreprise.
Document unique et qualité de vie au travail représentent donc deux démarches conjointes et complémentaires par lesquelles la gestion de la santé et de la sécurité au travail dépasse l’ancienne approche techno-centrée. Indissociablement liées, elles ouvrent une nouvelle ère de la prévention des risques dans laquelle les entreprises sont à la manœuvre pour réconcilier santé, sécurité et efficacité dans une démarche volontariste de progrès continu. C’est pourquoi, à l’occasion de la Semaine de la qualité de vie au travail qui se déroule, du 14 au 18 juin prochain, nous sommes heureux de revisiter cette démarche, à destination des TPE et PME, avec la conviction qu’elles sont particulièrement bien armées pour s’en emparer.
François Sidos
Président du Groupe Pôle Prévention
(1) Semaine Sociale Lamy, n°1793, 30/11/17.